Les sujets abordés dans cet article

  • Les fondements de l’Entreprise Autonome : la perspective de 2030
  • Son positionnement par rapport à l’Entreprise Digitale
  • Comment elle fonctionne
  • Son organisation
  • Son système d’information 100 % cloud (appelé « Système d’automatisation »)
  • Les perspectives

L’automatisation nous amène à refonder le fonctionnement de l’entreprise

Une Entreprise Autonome (Business autonome ou Autonomous business) est une entreprise entièrement automatisée qui fonctionne sans aucune intervention humaine. Des algorithmes et des méthodes diverses font face aux situations variées de sa vie quotidienne. Cela paraît très futuriste, mais en réalité pas tant que ça ! Nous sommes convaincus que ce sera la réalité de 2030.

L’idée de départ est la suivante :

Une entreprise entièrement automatisée devrait être libérée des contraintes liées aux organisations humaines.

Nous constatons en effet que ces contraintes structurent grandement l’entreprise traditionnelle. Par exemple l’organisation par domaines de savoir ou d’activité, le management de groupes humains, la gestion des carrières et des conflits humains…

La vision que nous développons ici est de repenser totalement le fonctionnement de l’entreprise lorsque les contraintes humaines ont disparu et que la machine travaille.

Bien souvent l’entreprise traditionnelle qui s’automatise fait faire à la machine ce que l’homme faisait. Mais finalement le modèle reste le même.

A contrario, nous repartons de la feuille blanche et repensons complètement le fonctionnement de l’entreprise 100 % nativement automatisée.

Une fois les idées claires sur le fonctionnement de l’Entreprise Autonome, nous pourrons établir les plans de transformation des entreprises de main d’œuvre dans la perspective du nouveau modèle.

Une urgence pour se développer

Curieusement, l’industrie est beaucoup plus automatisée que le tertiaire. Pourtant, utiliser des robots manipulateurs ou des machines spéciales semble bien plus compliqué que d’extraire des champs textes d’un formulaire ! Le tertiaire est aujourd’hui dans la situation où était l’industrie en 1970. Cependant, les technologies d’automatisation du tertiaire progressent aujourd’hui beaucoup plus vite que la robotique de 1970. Une entreprise tertiaire entièrement automatisée (ou presque) semble non seulement à portée de main mais également nécessaire pour regagner en compétitivité sur le plan mondial.

Entreprise Autonome vs Entreprise Digitale

La « digitalisation de l’entreprise » et son ultime, « l’Entreprise Digitale », correspondent à des entreprises de main d’œuvre qui améliorent leurs processus grâce à l’informatique. Il s’agit de ce qui est appelé Business 4.0.

L’Entreprise Autonome incarne la génération suivante (Business 5.0). Elle se conçoit comme l’ensemble des processus automatisés qui réalisent son dessein fondamental. Cependant, elle est bâtie sur de nombreux savoir-faire du Business 4.0. Mais a contrario, l‘automatisation est dans la génétique même de l’Entreprise Autonome. La digitalisation est juste une étape d’évolution nécessaire.

Une progression constante de l’automatisation

Le schéma suivant présente notre vision de la généralisation de l’automatisation dans les entreprises de main d’œuvre :

L’automatisation prend pied dans l’entreprise en partant des activités « simples » à exécuter. Au départ, on les trouve plutôt dans les processus de réalisation et de support. Ensuite, viennent les activités d’implémentation du modèle d’affaire, c’est à dire la fabrication du système d’information et des équipements automatisés au sens large. Là, une forte composante d’ingénierie est de plus en plus automatisable. Les tâches à forte créativité suivent, mais restent difficiles à automatiser aujourd’hui.

L’entreprise digitale traditionnelle

C’est donc une entreprise de main d’œuvre massivement informatisée. Nous observons que ces entreprises sont organisées par « services ». Ce sont des groupes d’individus travaillant sur un ensemble d’objets métiers constituant une dimension de savoir-faire, de production et surtout une unité de commandement. En effet il faut coordonner les humains pour qu’ils travaillent ensemble et qu’ils associent leurs efforts vers l’objectif fixé, avec ou par, le chef. Nous pouvons modéliser une entreprise de main d’œuvre suivant 4 Domaines principaux :

Évidemment, ces « services » disposent de leurs propres applications informatiques (CRM, SCM, Finance…) qui reflètent leur périmètre de pouvoir. Les données, traitements et décisions sont donc réalisés dans des silos. Le système d’information calque les zones de pouvoir humain. Cette structure a deux conséquences :

  • L’évolution de l’entreprise subit les résistances des périmètres de pouvoir internes
  • Le traitement des processus transverse est long et compliqué.

Même si tout le monde constate ces faits, très peu d’entreprises arrivent à refonder leur manière de produire de la valeur. Nous allons voir que l’Entreprise Autonome dépasse ces problèmes fondamentaux.

L’Entreprise Autonome

Une architecture d’entreprise à 3 niveaux

La figure suivante illustre les composants de l’Entreprise Autonome et leur agencement :

  • La « Stratégie« . Elle traduit le dessein de l’entreprise et la génétique de son modèle d’affaire. Ce niveau contient tous les processus d’élaboration, d’évaluation et d’ajustement de la Stratégie.
  • Le « Modèle d’affaire » : C’est la mécanique de création de valeur et de conversion en profit. Ce niveau contient tous les processus d’élaboration, de simulation et d’ajustement du Modèle d’affaire par rapport au réel constaté. Les statistiques y jouent un rôle important.
  • Les « Processus de réalisation » : Ils implémentent le Modèle d’affaire pour ce qui est de la production des biens et services rendus aux tiers (clients, partenaires, fournisseurs…). Ces processus forment le « gros du bataillon » des processus de l’entreprise.
  • Les « Adaptateurs » : Ce sont des processus qui définissent, règlent, adaptent et transforment les processus d’un niveau en fonction des demandes de son niveau supérieur.
  • Les « Évaluateurs » : Ce sont des processus d’évaluation des résultats et de feed-back en vue de l’ajustement du modèle et/ou des paramètres de fonctionnement.

L’Entreprise Autonome ignore les périmètres de pouvoir et la notion de commandement. Elle est purement centrée sur les processus, leur évolution et ce qu’ils produisent. L’automatisation des processus permet ainsi d’aborder le dessein de l’entreprise de manière holistique sans les freins des organisation humaine. Certains diront que nous revenons à la conception ancienne de « l’Organisation Scientifique du Travail« , et ils ont quelque part raison ! Sauf que ce sont les machines qui exécutent les tâches répétitives, plus les hommes.

Chaque niveau règle les paramètres des processus du niveau d’en dessous et remonte ses indicateurs de performance au niveau d’au-dessus. Par exemple, le Modèle d’affaire va régler le processus majeur « Positionner les produits sur le marché » en lui indiquant les prix et marges cibles.

L’ensemble des données est partagés dans un socle de données (aujourd’hui appelé Lac de Données). Toutefois il aura probablement une forme différente dans quelques années. Un socle de calcul expose des services utiles aux processus. Les acteurs internes et extérieurs à l »entreprise fournissent des événements qui sont stockés dans le socle de données. Ces événements nourrissent, voire déclenchent les processus.

Les domaines de savoir

Les processus enchaînent des activités, qui peuvent parfois être vues comme des sous-processus. Ils traitent un domaine de savoir, d’informations et des livrables à produire pour le processus appelant. La cartographie suivante montre un exemple de thématiques d’activités typiques d’une entreprise de eCommerce. En fait, cela change peu par rapport à une entreprise de main d’œuvre, mais il n’y a pas de silos organisationnels entre ces domaines et tout y est automatisé.

Un processus majeur invoque des sous-processus ou activités automatisés issus de cette carte. Par exemple, le processus « Vendre les produits » se déroule comme suit : une activité de « Order intake » est déclenchée par le client, puis de « Sourcing »,  de « Product customization » et pour finir « Order fulfillment ». Ce processus déclenche d’autres processus de suivi des clients et des affaires. Le système est piloté par les événements.

Construction de l’entreprise autonome

Le cycle de vie de l’Entreprise Autonome est présenté sur la figure suivante.

Création initiale

L’humain est bien présent dans la phase de création initiale. Il construit l’ensemble des niveaux présentés plus haut. Et il y a beaucoup de travail ! Seulement cela n’est pas fait en une fois, mais de manière itérative et apprenante. Cette construction progressive où l’homme s’efface progressivement est basée sur une méthodologie agile et de lean startup.

Le cycle « Exploitation – Évaluation – Adaptation »

En effet, ces 3 étapes traduisent la prise en compte du réel pour ajuster l’ensemble de l’édifice. D’une part dès que les processus majeurs sont établis, il est possible de mettre en production. Puis en observant les résultats, l’équipe humaine complète, ajuste, modifie les composants décrits plus haut. Lorsque la mécanique du modèle d’affaire converge, l’équipe prend juste un rôle de superviseur distant.

Exemples de fonctionnement

Nous n’allons pas décrire ici toute le fonctionnement d’une Entreprise Autonome. Mais le but est de montrer le potentiel de l’idée.

Illustration : Adaptation du modèle d’affaire

Dans une Entreprise Autonome, le modèle d’affaire est modélisé et simulable. Le modèle d’affaire fait l’objet d’une évaluation et régulation permanente par :

  • Les indices de performance mesurés
  • Les objectifs issus de la Stratégie
  • L’évaluation de scénarios alternatifs (What If) pour choisir les réglages à appliquer.

Prenons l’exemple d’une Entreprise Autonome qui fait la publicité de ses produits sur Google Ads. Les ratios de performance sont mesurés par les évaluateurs et agrégés dans un indicateur signifiant au niveau du Modèle d’affaire. Il est possible de réaliser une simulation « What If » en décalant une partie du budget publicité sur Facebook Marketing. L’API de Facebook permet de régler les paramètres des campagnes et de mesurer leur impact. La simulation du Modèle d’affaire fait des hypothèses de départ et règle la création d’une campagne en passant par un service SaaS spécialisé qui va répartir le budget sur Google et Facebook de manière automatisée. Reste à attendre pour comparer le réel à la simulation initiale et ajuster. L’ajustement est réalisé par un algorithme d’optimisation statistique ou un simple filtre numérique.

Illustration : Automatisation de l’Intelligence économique

Thématique

Cette thématique déroule notamment les activités automatisées suivantes :

  • Recherche et surveillance des concurrents et évaluation de leurs mouvements et dangerosité sur le marché
  • Détection des tendances et signaux faibles de l’évolution du marché
  • Analyse de la réglementation applicable aux produits et services fournis
  • Surveillance des marchés financiers sur les segments de marché adressés
  • Étude de la présence et de l’image dans les média
  • etc.

Ces activités sont des « petits » processus. Elles se nourrissent et produisent des informations transverses à l’entreprise et utilisées par d’autres processus : Mise à jour du catalogue produits, ajustement des prix en fonction des résultats de l’analyse concurrentielle… Ces activités sont largement automatisables pour fournir toutes les informations utiles à ces autres processus.

Principe général d’automatisation

La méthode suivante construit l’activité  :

  • Définition des informations produites par l’activité (objectifs)
  • Conception de l’activité par assemblage de sources de données et d’algorithmes
  • Tests et entraînement de l’activité
  • Déploiement en production et évaluation permanente de la performance.

Exemple de la Veille et surveillance automatisée des concurrents

Trois axes de caractérisation et les mesures associées de proximité indiquent le niveau de compétition entre deux entreprises :

  • Sémantique des métiers, intérêts et activités exécutés
  • Commerciale (clients identiques ou semblables)
  • Offre produits et services similaires ou apparentées.

Un scalaire entre 0 et 1. 1 représente la proximité. 1 représente une proximité totale.

Le processus de détection des concurrents et de mesure de leur dangerosité se déroule comme montré ci-dessous.

Ce processus fait appel au traitement sémantique automatisé des textes. Il alimente la base de données partagée qui recense les concurrents. A partir de là, une analyse de prix automatisée peut être déclenchée.

Généralisation

Cet exemple illustre deux faits :

  • De nombreux processus locaux aux fonctions décrites alimentent en données et événement les autres processus
  • L’Entreprise Autonome doit être vue de manière globale pour que tous ces processus soient cohérents et implémentent le Modèle d’affaire de l’entreprise
  • L’ensemble de ces processus font appel à de très nombreuses compétences, notamment techniques. Il est indispensable de s’appuyer sur les savoir des autres, notamment présents dans le SaaS.

Organisation de l’Entreprise Autonome

Vision cible

L’Entreprise Autonome a naturellement un périmètre commercial détouré par une stratégie et un modèle d’affaire formalisés, simulables et automatisables. Aujourd’hui il paraîtrait aberrant de vouloir transformer une grande multinationale en une seule Entreprise Autonome. Des périmètres d’affaire sont à définir pour que l’on puisse constituer des Entreprises Autonomes réalistes et dont le risque opérationnel est acceptable. Une grande société peut donc être découpée en Entreprises Autonomes qui répondent à des mêmes objectifs stratégiques de haut niveau. La figure suivante illustre ce fait où 3 Entreprises Autonomes résident sous un même chapeau stratégique.

Une Entreprise Autonome est constituée au départ d’une équipe humaine qui regroupe 3 savoir-faire : Le marketing, l’Automatisation, la Finance. Cette équipe travaille de manière rapprochée en agile et lean startup. Dans les faits, cette équipe se subdivise en Process Teams qui font la conception et la réalisation des processus automatisés. On peut rapprocher cette organisation des « Feature teams » agiles, mais avec une portée explicitement affichée « processus » et pas feature. Toutefois, l’organisation en Process Team ne va pas fonctionner si le système d’information est conçu dans les mêmes paradigmes que ceux appliqués jusqu’alors, c’est à dire des développements, intégrations et déploiement longs et coûteux. Nous allons examiner ce point plus bas.

Un socle de données et de calcul est partagé entre les Entreprises Autonomes. Il aide à l’implémentation de la cohérence stratégique et à créer plus de valeur.

Le système d’opération autonome est le système d’information entièrement automatisé que l’on va détailler un peu plus bas.

Une organisation émergente et agile

Les entreprises qui se « digitalisent » optent assez souvent pour une entité « Digitale » qui calque le modèle de la DSI, en l’agilisant un peu et en l’isolant autant que possible du système informatique legacy. Cette approche n’est pas assez disruptive pour donner réellement des résultats intéressants. La cible de l’Entreprise Autonome donne une nouvelle ambition même si tout n’est pas faisable aujourd’hui. Rappelons que nous œuvrons dans la perspective de 2030.

La difficulté de l’Entreprise Autonome est d’arriver rapidement à un niveau d’automatisation élevé. Certes il est possible de démarrer avec des morceaux de processus exécutés à la main lorsque la technologie n’est pas capable d’exécuter les fonctions demandées. C’est bien là que l’analyse de la valeur et que l’organisation agile prennent tout leur sens dans cette ambitieuse aventure.

Le système automatisé de l’Entreprise Autonome

Caractéristiques essentielles du système automatisé

La nécessité est de réaliser rapidement des processus entièrement automatisés. Vu la lenteur et le coût des développements logiciels, ce n’est pas par cette voie que l’Entreprise Autonome peut se construire. Les Process Teams, couvrant un spectre fonctionnel supérieur à une application logicielle doivent se simplifier la vie. Elles ont besoin de puissants accélérateurs et raccourcis pour tenir leurs objectifs. Nous utilisons 5 accélérateurs majeurs à utiliser coûte que coûte :

  • L’usage du cloud et que le cloud : les fonctions offertes en SaaS et PaaS
  • La RPA pour intégrer les applications faiblement intégrables par les API ou les données
  • Le Low-code (aPaaS) pour produire des applications spécifiques
  • Les fonctions cognitives et l’apprentissage
  • L’automatisation totale du déploiement du système d’automatisation lui-même dans le cloud SaaS/aPaaS.

Le système suit les patterns d’architecture suivants :

  • Il est réactif : piloté par événements, élastique, disponible et résilient.
    Autant de caractéristiques qui vont orienter le choix des solutions SaaS et PaaS
  • il est distribué et sécurisé par des mécanismes de fédération
  • Il découple les canaux d’entrée et de sortie
  • Il dispose d’un stockage de données logique unique et partagé
  • il utilise les API  et le Serverless pour exposer et consommer les services
  • il est déployable et réparable automatiquement.

Ces règles mènent à un système entièrement distribué dans le cloud avec toutes les difficultés que cela apporte :

  • les exigences de sécurité et de conformité
  • la qualité de service livrée in fine
  • le coût final à l’exploitation quand le volume augmente
  • le PRA et le PCA
  • la réversibilité.

L’Entreprise Autonome se concentre sur ces difficultés pour aboutir à son objectif de manière industrielle.

Notre conviction est que peu d’entreprises peuvent se permettre de réaliser un système automatisé en spécifique in house. Le PaaS est vraiment la limite basse acceptable car écrire du code prend trop de temps et coûte trop cher. Seul l’intégration de SaaS et de aPaaS réduisent les temps et coûts de manière significative.

Exemple de composants d’automatisation à utiliser

Le système automatisé de l’Entreprise Autonome fait appel à de nombreux composants disponibles dans le cloud et que nous détaillons dans d’autres articles sur ce blog. La figure suivante regroupe les principaux composants et offres cloud que l’on peut retenir pour constituer un système automatisé 100 % cloud. Elle donne que quelques offres disponible et est très loin d’être exhaustive. Google, AWS, Azure sont pratiquement sur tous les sujets, aussi nous les avons positionnés que sur ceux où il nous paraissent les plus pertinents.

Tous les composants nécessaires sont disponibles. Mais l’architecte du système n’a plus du tout le même travail que dans les entreprises du 20e siècle : Il doit non seulement connaitre les offres, mais également les technologies sous-jacentes. Il imagine les intégrations qui répondent aux patterns décris au dessus.

Pour aller plus loin

Le principe est donc d’adopter l’idée qu’une entreprise est un ensemble de processus automatisés affranchis des contraintes humaines.

Le modèle systémique présenté dans cet article est conçu par l’humain au départ puis s’auto-adapte. Un système d’automatisation 100% cloud permet de se concentrer sur les opérations et de réduire les coûts et temps de construction.

En prenant cette vision pour cible, chaque réflexion, orientation et choix permet de s’approcher de l’Entreprise Autonome.

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